Une équipe du Centre de recherche du CHUM et de l’Université de Montréal découvre une molécule capable en laboratoire d’inhiber les variants préoccupants de la COVID-19.
VE607. Un nom de code? Plutôt celui d’une idée qui germe au printemps 2020 dans l’esprit de Christian Baron, chercheur en recherche fondamentale à l’Université de Montréal et professeur au Département de biochimie et médecine moléculaire.
Derrière cet acronyme se cache une molécule découverte en 2004 pour lutter contre le SRAS, proche cousin du SRAS-CoV-2. Compte tenu de la fin rapide des contaminations au SRAS, son développement a été abandonné prématurément.
Christian Baron y voit une occasion. Pourquoi ne pas évaluer la capacité d’inhibition de cette molécule sur le virus responsable de l’actuelle pandémie?
Une collaboration de haute volée
Il fait appel à l’expertise de son collègue Andrés Finzi, chercheur au Centre de recherche du CHUM, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en entrée rétrovirale et professeur à l’UdeM au Département de microbiologie, infectiologie et immunologie.
«J’avoue que je n’y croyais pas trop au départ. Nous avions déjà essayé de recycler des molécules existantes et les résultats s’étaient révélés mitigés. Mais là, cela fonctionne très bien avec Alpha, Bêta, Gamma, Delta et Omicron! Tous les variants ont été inhibés», dit Andrés Finzi.
Dans une nouvelle étude non révisée par les pairs et mise en ligne sur le serveur de prépublication bioRxiv, les chercheurs, coauteurs principaux de ces travaux de recherche, ont démontré que la molécule VE607 s’attache au spicule du virus (protéine S), sa «clé d’entrée», le fige dans une conformation particulière et l’empêche ainsi de débarrer la porte des cellules saines et de les infecter.
Des mécanismes encore à éclaircir
Les scientifiques ont aussi constaté que la molécule VE607 stabilise le domaine de liaison au récepteur dans sa conformation «haute», ce qui pourrait expliquer l’inhibition des différents variants étudiés.
Le domaine de liaison aux récepteurs est un élément clé du virus qui lui permet de s’arrimer aux récepteurs de l’organisme pour pénétrer dans les cellules.
«Mettre en lumière l’efficacité de ce nouvel inhibiteur de coronavirus ouvre la voie à la mise au point de nouveaux médicaments pour la prévention ou le traitement des infections liées à la COVID-19. Il faudrait compter au minimum un an pour pouvoir optimiser la capacité d’inhibition de la molécule et faire des tests sur l’humain», indique Christian Baron.
Ce projet de recherche n’aurait pu aboutir sans la collaboration étroite entre son équipe et celles d’Andrés Finzi et de leurs collègues aux États-Unis.
La Faculté de médecine de l’UdeM les a aussi soutenus financièrement grâce à une subvention du fonds Combattre la COVID-19: de la prévention au contrôle.
Ekat Kritikou, vice-doyenne à la recherche et au développement de la faculté, tient d’ailleurs à réitérer l’importance de la philanthropie et des donateurs et donatrices de l’Université qui ont financé ce concours facultaire.
«Ce type de financement est d’une valeur inestimable, car il est souvent utilisé comme levier pour faire progresser les découvertes scientifiques. Nous avons ici un bel exemple d’une percée qui pourra contribuer à concevoir de nouvelles approches thérapeutiques pour combattre la COVID-19», conclut-elle.